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L’incapacité du président Rohani à nommer une femme ministre en Iran marque l’instabilité de Téhéran

 

Le nouveau cabinet entièrement masculin de Rohani a été approuvé par le parlement des mollahs (Majlis) le 20 août 2017, démontrant à nouveau que non seulement il n’est pas modéré, mais un démagogue qui a faussement promis d’améliorer les libertés civiques, comme les droits des femmes, lors de sa campagne électorale.

 

Rohani avait prétendu que son gouvernement « n’accepterait pas la discrimination fondée sur le genre et l’injustice». Il avait également promis de nommer au moins une femme ministre. Mais le jour venu, « aucune femme qualifiée » n’a été trouvée.

 

Dans un reportage, la chaîne CNN a signalé que « le président nouvellement réélu de l’Iran n’a pas inclus de femmes dans sa liste de 17 ministres, renonçant ainsi à un engagement électoral fait à sa base largement réformiste … L’exclusion des femmes de la liste proposée était largement attendue, même si la nomination d’une femme ministre était une promesse centrale de Rohani pendant sa campagne électorale. »

 

Al-Monitor de son côté a écrit : « Les réformistes s’attendaient à ce que Rohani nomme au moins une femme ministre – une attente qui ne s’est pas concrétisée ». Pour Reuters, « le président iranien Hassan Rohani a nommé deux femmes vice-présidentes mercredi, mais n’a apporté aucun changement à une liste de ministres hommes, critiquée par les réformistes pour le manque de représentation féminine. En réaction aux critiques concernant le manque de femmes ministres dans le nouveau Cabinet, le porte-parole du gouvernement, Mohammad Bagher Nobakht, a déclaré: “Les femmes auront encore un rôle important. C’est une injustice faite aux femmes de penser qu’elles ne devraient être utilisées que pour remplir des rôles ministériels”. » Par «jouer encore un rôle important», Nobakht faisait référence à la nomination de trois personnes dont seulement deux nommées à titre d’adjointes et une nommée conseillère de Rohani.

 

Malheureusement, la presse occidentale fait le jeu des misogynes de Téhéran en traduisant à tort ces postes par les mots de «vice-présidente». Dans tout gouvernement, le rôle d’un/e vice-président/e est habituellement associé à quelqu’un qui est l’e bras droit du président et jouit des pouvoirs d’agir à sa place ou de remplacer le/la président/e si les circonstances l’exigent.

 

Loin d’être vice-présidentes, ces femmes n’ont même pas les pouvoirs nécessaires pour s’acquitter de leurs fonctions. Par exemple Shahindokht Molaverdi, qui avait occupé le poste de directrice à la présidence pour les affaires féminines et familiales lors du premier mandat de Rohani, a reconnu à plusieurs reprises qu’elle ne jouissait pas de pouvoirs exécutifs pour faire avancer ses projets. Chaque fois qu’elle tentait de prendre une mesure superficielle en faveur des femmes – caution dont le gouvernement Rohani avait grandement besoin dans ses relations étrangères – elle devait reculer sous la pression. Dans une interview publiée par le site Tnews.ir, le 24 août 2015, elle a déclaré : « puisque nous n’avons pas de statut de dirigeante, nous n’avons pas encore trouvé la relation souhaitée et efficace avec d’autres systèmes et en province nous avons rencontré de sérieux obstacles dès le début. »

 

Molaverdi a finalement été démise de son poste et remplacée par Massoumeh Ebtekar, impliquée dans la prise d’otage de l’ambassade américaine à Téhéran en 1979, elle-même évincée de son poste de responsable de l’Agence de la protection de l’environnement et remplacée par un homme. Shahindokht Molaverdi a été nommée conseillère du président pour les droits des citoyens dans un pays qui est le principal violateurs des droits humains dans le monde et qui détient le record des exécutions par habitant, 3500 pour le seul premier mandat présidentiel de Rohani dont au moins 80 femmes.

 

L’autre femme nommée à un poste non ministériel s’appelle Laya Jonaidi, déléguée présidentielle pour les affaires juridiques. Afin d’assumer sa fonction, elle a été obligée de porter un tchador, voile noir recouvrant le corps de la tête au pied, pour occuper un poste gouvernemental.

 

Certains cercles qui avaient cru dans les promesses électorales de Rohani ont été extrêmement découragés par ce revirement. Parvaneh Salahchouri, qui dirige le groupe de femmes au parlement des mollahs, a critiqué le président Rohani : « Il est incroyable et choquant que le président ait ignoré la moitié de la société iranienne. Créer l’égalité des chances pour les femmes et éliminer la discrimination fondée sur le sexe figuraient parmi les promesses du candidat présidentiel. Malheureusement, non seulement les femmes n’ont pas de chances égales, mais elles n’ont aucune opportunité! » (Agence, 9 août 2017)

 

Dans une séance ouverte au parlement le 9 août 2017, la même députée a réitéré : « L’Iran fait partie des  quelques pays au monde dont les femmes ne jouissent d’aucun poste de haut niveau en tant que décideures politiques … Aujourd’hui, plus de la moitié des diplômés universitaires (du pays) sont des femmes. Les femmes sont présentes dans divers domaines économiques, politiques, sociaux et culturels. Cependant, lorsqu’il s’agit de nommer des femmes ministres, le prétexte est toujours leur manque d’expérience de haut niveau. Et ce cercle vicieux continue. » Elle a ajouté : « L’écart entre les sexes est l’un des critères d’évaluation du développement de n’importe quel pays et l’Iran s’est classé au 139e rang en 2016 sur 144 pays. »

 

Puisque la dictature religieuse des mollahs repose sur le pilier de la misogynie, le président Rohani et son gouvernement sont obligés de s’y plier. Même si le président Rohani avait nommé plusieurs femmes à son gouvernement, cela n’aurait pas suffi à résoudre les problèmes des femmes. Pour ce faire, ils doivent éliminer les nombreux obstacles qui existent actuellement, inhérent au système politique iranien dominé par les hommes. C’est pourquoi la simple présence d’une ou de quelques femmes au gouvernement ne suffirait pas à éliminer la discrimination à l’égard des femmes et à combler l’écart entre les sexes sur les fronts économiques et sociaux.

 

Les femmes font face à la discrimination de nombreuses manières, tant en droit qu’en pratique, sous le régime intégriste islamiste qui régit l’Iran. Elles font face à des droits inégaux et des discriminations sur les questions du mariage et du divorce, l’héritage, l’indemnisation juridique, leur témoignage ne vaut que la moitié de celui d’un homme et elles doivent obtenir la permission de leur père, mari ou frère pour quitter le pays. Elles sont marginalisées dans l’économie et embauchées principalement dans les secteurs des services non officiels avec des salaires bien inférieurs au salaire minimum et ne bénéficient d’aucune assurance sociale. Leur participation économique s’élève à 13% au maximum. Ainsi, l’incapacité du président Rohani à nommer une femme ministre à son gouvernement indique que le régime iranien n’a pas la moindre capacité à tolérer, même dans un geste symbolique, la reconnaissance du droit des femmes à ne pas être exclues d’un poste supérieur sur la simple base de leur sexe. Cela signifie que le régime misogyne de Téhéran ne peut pas abandonner l’exclusion des femmes (aux postes de direction) le refus de leur égalité dans les droits humains, de sorte que cela entraînerait la perte du pouvoir pour les mollahs.

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