En Iran, ce sont les femmes qui sont la force motrice du changement. On l’a vu tout au long des contestations de l’année dernière, et surtout pendant les révoltes de décembre et janvier.
Les femmes, cibles privilégiés de l’oppression pendant les 39 années de la théocratie, ne se sont jamais soumises.
Les discriminations et les séparations sexuelles et toute la gamme des restrictions et contraintes imposées aux femmes ont eu un effet inverse de celui souhaité par le pouvoir en place. Cette répression a plutôt contribué à forger un caractère de rebelle pour les femmes.
Au niveau de l’éducation, la légalisation du mariage des petites filles, les multiples discriminations dans le primaire et le secondaire, les nombreux tabous qui sévissent encore dans les milieux ruraux, la précarité galopante et bien d’autres facteurs font que des dizaines de milliers de filles abandonnent l’école dès leur enfance.
Et ce n’est pas mieux dans les études supérieures. Les femmes sont interdites d’étude dans 80 matières universitaires. Par ailleurs, certaines universités imposent même des quotas d’entrée pour les femmes. La séparation des sexes dans les écoles supérieures et les universités ajoutent aux restrictions qu’elles subissent, notamment le manque de professeur dans certaines matières. Mais toutes ces contraintes n’ont pas empêché les femmes de représenter depuis une quinzaine d’année, plus de 50% des entrées de la première année.
C’est encore plus dramatique dans le domaine du sport. Les sportives de haut niveau ne sont sponsorisées ni par l’État, ni par le privé. Elles doivent souvent payer de leur poche les frais du voyage et du matériel pour les tournois internationaux. Toutes ces contraintes n’ont pas eu raison de la grande motivation des Iraniennes pour le sport, ni des médailles qu’elles ont récoltées sur la scène internationale.
Le Guide suprême de la théocratie a interdit le cyclisme des femmes dans les lieux publics, ce qui n’a pu empêcher la promotion de ce sport dans la société, ni la participation des Iraniennes au cyclisme dans les jeux asiatiques.
Les footballeuses iraniennes manquent de terrains aussi bien pour leurs entrainements que pour leurs matchs. Les rencontres sont fermées aux médias et ne sont jamais retransmises. Ceci n’a pas empêché l’équipe nationale féminine d’être parmi les meilleures d’Asie.
En outre, les femmes sont interdites d’entrer aux stades pour les matchs masculins. Les plus hauts dignitaires religieux du pouvoir ont à maintes reprises rejeté les requêtes de la société civique iranienne de lever cette interdiction. N’empêche que de nombreuses femmes font fi de ces rejets et se déguisent en homme pour supporter leur équipe favorite dans les stades.
Dans le domaine de l’art et de la musique, la femme est interdite de chanter. De nombreux concerts ont été annulés à cause de la présence des femmes dans l’orchestre. Mais vous trouverez de plus en plus de femmes artistes et musiciennes en Iran.
En ce qui concerne le code vestimentaire obligatoire imposé aux femmes, le régime est entièrement débordé. Depuis une dizaine d’années au moins, les Iraniennes ne cessent de défier ce code vestimentaire et de tenir tête aux humiliations des patrouilles de la police des mœurs. Aujourd’hui, elles contestent bravement cette loi en public, en enlevant leur voile, malgré les conséquences qu’elles encourent.
Quant à la scène politique, Hassan Rouhani, le Président de la théocratie n’a même pas osé introduire une seule femme dans son cabinet. On sait bien qu’une ministre femme n’aurait de toute manière pas pu résoudre le problème de la condition féminine sous le régime des ayatollahs. Ce dernier est cependant si vulnérable sur la question des femmes, qu’il est incapable de s’adonner à un geste ne fut-ce que symbolique, qui faisait d’ailleurs partie de ses promesses.
Malgré leur absence totale dans la hiérarchie du pouvoir, les femmes ont cependant toujours été devant la scène de toutes les contestations au cours de l’année dernière, notamment lors des révoltes de décembre et janvier. Du côté des prisons, les détenues politiques ne cessent d’envoyer des messages de résistance à leurs consœurs dans la société, malgré les dangers auxquels ces messages les exposent. Cette présence féminine dans la gronde était si remarquée qu’un journaliste écrivit : « Les vraies résistantes, il faut les voir dans les rues de l’Iran »[1].
Cette résistance n’est bien sûr pas innée. Les Iraniennes ont toujours eu leurs sources d’inspiration. Dès le début de la théocratie, les militantes des Moudjahidine du peuple ne cessaient de défendre les libertés en pleine rue et de défier les règles imposées par les ayatollahs sous le prétexte de l’Islam. Elles ont payé un lourd tribut pour cette résistance, avant d’accéder aux postes dirigeants du mouvement dans l’un des tournants les plus cruciaux de l’Histoire de l’Iran.
En 1995, Maryam Radjavi, la dirigeante de l’opposition, a présenté son programme sur la condition féminine en Iran, s’engageant à reconnaître l’égalité des sexes dans tous les domaines politique, judiciaire, social, religieux, culturel et économique. Ce programme reconnaît notamment le libre comportement vestimentaire des femmes, ainsi que leur liberté du choix dans le mariage et le divorce[2].
Mme Radjavi a également lancé un appel à tous les États démocratiques pour faire pression sur la dictature de Téhéran pour libérer tous les manifestants arrêtés lors des révoltes, qui sont torturés en prison et menacés de la peine capitale, notamment les femmes. La patronne de l’opposition iranienne a également appelé ses interlocuteurs occidentaux à contribuer à la liberté d’expression et d’association en Iran et à faire pression sur la dictature religieuse afin de mettre fin à la répression des femmes et d’annuler la loi sur le port obligatoire du voile.
La Commission des femmes du Conseil national de la résistance iranienne appelle tou(te)s les militant(e)s des droites de l’homme et des droits des femmes à soutenir les luttes des femmes iraniennes, notamment la campagne de cette commission pour la libération des prisonnières politiques en Iran.
[1] https://www.gatestoneinstitute.org/11655/women- freedom-iran
[2] Maryam Rajavi on women’s rights in tomorrow’s Iran – women.ncr-iran.org/ten-point-plan-for-women