CNRI Femmes – Les enseignants en Iran vivent sous le seuil de pauvreté et ne bénéficient d’aucune forme de soutien. Ils comptent se faire entendre le 5 octobre, lors de la Journée mondiale des enseignants, journée qui vise à honorer leurs efforts et leur impact sur l’esprit des jeunes générations.
Les femmes représentent plus de la moitié des enseignants en Iran. Elles vivent de salaires bien inférieurs au seuil de pauvreté et sont en même temps confrontées à de nombreuses discriminations sociales et juridiques en raison de leur sexe. Malgré une énorme pression de travail, elles ne reçoivent pas de salaire équitable.
Une enseignante militante a récemment fait remarquer : « Chaque année, le budget adopté pour l’éducation ne suffit qu’à couvrir les dépenses de base et les salaires des enseignants, ce qui équivaut déjà à la moitié du seuil de pauvreté. ». (Mojgan Bagheri, salamatnews.com, 26 septembre 2018)
Un parlementaire a expliqué : « Les éducateurs du Mouvement d’alphabétisation ne perçoivent pas de salaire pendant plusieurs mois et sont privés de sécurité de l’emploi. Le salaire des enseignants engagés par le ministère de l’Éducation est également loin d’être décent. Les enseignants luttent pour gagner leur vie tout en remplissant leurs obligations professionnelles. Dans un bon système éducatif, les enseignants doivent jouir de la plus grande valeur et importance. Cependant, cela ne s’est pas produit pour les enseignants iraniens et ils sont confrontés à une pléthore de problèmes, particulièrement des problèmes économiques. (Seyed Mohammad Javad Javad Abtahi, membre de la commission de l’Education et de la Recherche au Parlement des mollahs, salamatnews.com, 26 septembre 2018)
Les enseignants employés officiellement et à temps plein par le ministère de l’Éducation gagnent 1,4 million de tomans par mois (140 $) alors que le seuil de pauvreté est de 5 millions de tomans (500 $). C’est moins d’un tiers de ce dont ils ont besoin pour subsister. La majorité des enseignants, cependant, travaillent sous contrat temporaire.
Le salaire mensuel des enseignants contractuels se situe entre 300 et 450 000 tomans (30-45 $), ce qui est bien en-dessous du salaire minimum de 930 000 tomans (93 $), qui est lui-même inférieur au seuil de pauvreté, n’en constituant qu’un cinquième. Ils ne bénéficient d’aucun avantage non plus.
Néanmoins, il arrive fréquemment que les enseignants ne reçoivent pas de salaire pendant des mois.
Les enseignants contractuels suppléent à la pénurie de professeurs dans les écoles. Le ministère de l’Education a empêché pendant des années toute fuite d’informations sur le nombre d’enseignants contractuels et leur sexe. Compte tenu des nombreux obstacles juridiques auxquels se heurtent les femmes dans l’emploi en Iran, étant donné que la majorité des Iraniennes occupent des emplois dans les secteurs privé et non officiel, et en analysant la composition des participants aux manifestations, on peut en conclure que les femmes représentent une grande partie des enseignants contractuels.
Pour tirer davantage parti des femmes, le régime iranien ne met pas à la retraite les femmes qui ont plus de 25 ans d’expérience professionnelle. (Afkarnews, 2 mai 2016)
Comme la plupart des enseignants font les deux ou trois/8 par jour pour subvenir aux besoins de leur famille, ils ont tellement de soucis qu’ils n’ont manifestement pas beaucoup d’énergie à consacrer à l’éducation des enfants.
Ces trois dernières années, l’Association des Enseignants (syndicat indépendant non officiel) a appelé à de nombreuses manifestations à l’échelle nationale pour exprimer ses revendications et ses besoins généraux. Plus récemment, l’association a lancé une campagne où les enseignants ont déchiré leurs fiches de paie.
La manifestation nationale des enseignants du 10 mai 2017, qui s’est tenue dans 32 villes, n’était qu’un exemple de la constestation généralisée des enseignants face aux bas salaires, aux conditions de vie difficiles, au manque d’assurance et d’autres avantages sociaux, ainsi qu’au non-paiement de leurs salaires en souffrance depuis des mois consécutifs.
A Téhéran, les protestations des enseignants se sont heurtées à la violence des forces de sécurité, où des enseignants militants ont été arrêtés. Six enseignants, dont Mme Aliyeh Eghdam-Doust, ont été arrêtés devant le bâtiment de l’Organisation du budget et du plan, puis condamnés le 15 septembre 2018 à neuf mois de prison et 74 coups de fouet pour “trouble à l’ordre public par leur participation à des rassemblements illégaux” et “défi aux officiers en fonction”. Ceci alors que la protestation des enseignants était d’exiger une augmentation de leurs salaires qui se situent en dessous du seuil de pauvreté.
Le recours à la violence contre les rassemblements pacifiques d’enseignants a été si scandaleux qu’il a suscité des critiques au parlement des mollahs et a été largement couvert par la presse.
Malgré les grands risques et les intimidations, les femmes ont toujours été à l’avant-garde des protestations des enseignants pour exiger et obtenir leurs droits.
[1] Fatemeh Saïdi, députée de Téhéran, a déclaré lors d’une séance publique du Majlis (parlement) le 13 mai dernier : “Le rassemblement pacifique des enseignants contre leurs terribles conditions de vie a tourné à la violence en raison d’une l’intervention aberrante (de la police) au mépris de l’article 27 de la Constitution, et un groupe de manifestants a été arrêté. Durant les événements de décembre et janvier où diverses couches de la société ont joué un rôle, on a souligné qu’il fallait écouter les plaintes de la population. Aujourd’hui, en tant qu’enseignante, je voudrais profiter de cette tribune, pour faire entendre la voix des enseignants. Est-il sage de de frapper et d’arrêter un enseignant qui demande uniquement l’amélioration de ses conditions de vie et de la qualité de l’enseignement ? » (SalamatNews.com )