Introduction
Juin a été marqué par l’exécution d’une femme et la poursuite des mauvais traitements des prisonnières politiques et de conscience.
Narguesse Mohammadi a fait une grève de la faim pour réclamer le droit d’appeler ses enfants au téléphone.
Hospitalisée, Maryam Naghash Zargaran a été renvoyée en prison, après une autorisation de sortie médicale, ne lui permettant pas d’aller jusqu’au bout de son traitement médical. Et Fahimeh Esmaïli, prisonnière politique, a été violemment tabassée à la maison d’arrêt de Yassouj.
Les arrestations collectives dans des raids sur des soirées privées, les persécutions des minorités religieuses et la détention de binationales ont continué.
La police a lancé de nouvelles campagnes dans les villes contre les femmes qui dérogent au code vestimentaire obligatoire.
Néanmoins, les femmes ont continué à protester, avec une participation importante dans la plupart des manifestations du mois de juin.
Violations systématiques du droit à la vie
Exécutions, exécutions arbitraires, décès en détention et condamnations à mort
Une femme non identifiée a été pendue le 2 juin 2016 à la prison centrale de Qazvine après deux ans d’emprisonnement.
Le nombre total de femmes exécutés sous Rohani s’est donc élevé en juin à 69.
Les traitements inhumains et châtiments cruels
Amputations, flagellations, tortures et humiliations
Fahimeh Ismaili, prisonnière politique à Ahwaz, a été violemment tabassée le 2 juin 2016 à la prison de Yassouj et a perdu connaissance.
Arrestations arbitraires
Les rafles lors de raids contres des fêtes privées ont continué à Téhéran et dans d’autres villes du pays durant le mois de juin.
Le 3 juin, douze jeunes femmes ont été arrêtées dans un jardin privé dans la province d’Alborz.
Le 4 juin, la police a fait une descente dans une maison et arrêté 30 femmes à Téhéran.
Six femmes ont été arrêtées à Saadat Abad, un quartier de la capitale, le 5 juin et 21 personnes ont été arrêtées dans une fête. Elles étaient accusées d’être « mal-voilées ».
Une professeur irano-canadienne a été arrêtée à Téhéran. Homa Hoodfar avait déjà été arrêtée le 6 juin 2016, quelques jours avant son retour prévu au Canada. Son passeport lui a été confisqué et Hoodfar a été interrogée. Son avocat et sa famille n’ont pas été autorisés à la voir, et la raison de son arrestation n’a pas été donnée. Elle est maintenue en prison.
Prison
La pression continue sur les détenues
Un nouveau rapport sur les prisons de femmes de Qarchak et Varamine, jette un peu de lumière sur les conditions de vie déplorables des prisonnières. Le rapport indique qu’un grand nombre de femmes sont détenues dans une petite zone dans des conditions d’hygiène épouvantables. La pénurie de lits les oblige à dormir serrées « comme des sardines » à même le sol. Les prisonnières ne reçoivent pas de nourriture ou de médicaments appropriés. L’absence de soins médicaux pour les malades, et les causes d’épidémies dangereuses en prison ont donné lieu à un nombre élevé de prisonnières ayant contracté une hépatite et le SIDA.
Par ailleurs :
La prisonnière politique Narguesse Mohammadi a commencé une grève de la faim le 27 juin 2016 pour protester contre la privation de contact téléphonique avec ses enfants. Dans une lettre expliquant les motivations de sa grève de la faim, elle écrit : Contrairement à toutes les autres prisons, les détenues de la prison d’Evine sont privées d’appeler leurs familles. Il leur est interdit de passer des coups de fil.
Sept ans après avoir été arrêtée durant le soulèvement de 2009 en Iran, la prisonnière politique Reyhaneh Haj Ibrahim incarcérée à Evine (Téhéran) n’a toujours pas eu une seule permission de sortie. Parvaneh Taheri, la mère de Reyhaneh, a déclaré aux médias que sa fille a été condamnée à mort, peine commuée à 15 ans de prison, mais qu’elle n’avait pas eu un seul jour de sortie depuis 2009.
Afsaneh Bayazidi une étudiante de Boukan (Kurdistan iranien), a été arrêtée et torturée à la prison des services de renseignement d’Oroumieh, dans le nord-ouest de l’Iran. Après deux mois sans nouvelles d’elle, sa mère a été informée par téléphone le 17 juin, que sa fille se trouvait au centre de détention d’Oroumiyeh sans avoir eu de procès. Afsaneh Bayazidi a été arrêtée à son domicile le 24 avril 2016, par les forces de sécurité sans le moindre mandat, qui ont saccagé son domicile et confisqué ses biens.
La prisonnière chrétienne Maryam Naghash Zargaran est retournée en cellule à la prison d’Evine, le 27 juin, sans avoir pu compléter son traitement médical. Le parquet a refusé de prolonger l’arrêt de maladie de cette prisonnière d’opinion grièvement malade et l’a forcée à retourner en prison en menaçant de lui confisquer sa caution.
La prisonnière Nahid Gordji, qui souffre de diabète et de complications cardiaques, a été privée de soins médicaux et de ses médicaments indispensables. Agée de 50 ans, elle a été condamnée à cinq ans de prison pour ses activités dans les réseaux sociaux sur Internet. Elle est incarcérée à la prison de Vakilabad dans la ville de Machad (nord-est de l’Iran) depuis le 8 mai 2016.
Roya Saberi Nobakht, emprisonnée pour ses activités sur Facebook, est détenue en prison malgré son état de santé critique. Les autorités pénitentiaires n’ont donné aucun traitement médical à la prisonnière, malgré ses convulsions répétées. Citoyenne anglo-iranienne, elle a été arrêtée en octobre 2013.
Libertés fondamentales et atteintes aux droits
La répression générale des femmes s’est focalisée autour du code vestimentaire obligatoire instauré par le gouvernement. Le chef de l’appareil judiciaire d’Ispahan a annoncé que de nouvelles unités sont entrées en fonction pour contrôler la tenue vestimentaire des femmes dans les rues.
“Nous avons attribué des véhicules pour la promotion de la vertu et la prohibition du vice contre les mal-voilées. Les patrouilles ont donné des avertissements à plus de 1000 femmes à ce jour pour qu’elles réajustent leurs tenues”, a-t-il expliqué.
Par ailleurs, le commandant des gardiens de la révolution (pasdaran) de la ville de Kermanchah, dans l’ouest de l’Iran, a rapporté le déploiement d’une manœuvre pour contrôler les femmes, précisant que “500 agents ont pris part à cette opération et ont investi les artères les plus importantes de la ville”.
Le contrôle des plages pour empêcher les femmes de se baigner était aussi un autre volet des plans répressifs en juin. Le commandant de la police du Guilan, province du nord de l’Iran qui borde la mer Caspienne a annoncé la mise en œuvre d’un plan en 140 points le long des plages de la « côte d’Azur » iranienne et dans les zones de loisirs, où il a déployé des hordes d’agents en civil et de miliciens.
Concernant les graves problèmes touchant les femmes en Iran, le ministre du Travail de Rohani a admis que le taux de toxicomanie des femmes était passé de 4 à 10 pour cent.
Le ministre a expliqué: “Il y a 1142 centres de réadaptation pour toxicomanes à travers le pays. La proportion de femmes dans ces centres par rapport aux hommes est d’environ 10 %, une estimation qui peut valoir pour toute la société.”
Par ailleurs, un nouveau rapport publié en juin a rappelé la pratique courante de la vente des nouveau-nés, ce qui reflète la propagation de la pauvreté chez les femmes. Le rapport indique que les femmes SDF qui dorment dans des boîtes en carton dans la rue se rendent dans les hôpitaux du centre ou du sud de Téhéran pour accoucher et les vendent aussitôt cent à deux cent mille tomans, poussées par la misère, pour trouver de quoi survivre.
Fatemeh Daneshvar, membre du Conseil municipal de Téhéran, a relevé un autre phénomène croissant à Téhéran avec les grossesses de jeunes fugueuses qui fuient dans d’autres villes où leurs bébés sont vendus à un prix plus élevé. Fatemeh Daneshvar a souligné que ses services ont suivi cinq hôpitaux pendant huit mois et ont découvert que 150 bébés de toxicomanes y étaient nés ; il faut en conclure que le nombre réel de bébés nés sous dépendance de drogue, à cause de leurs mères toxicomanes, doit être estimé comme plus grand.
Un autre rapport alarmant a indiqué qu’au moins 10.000 jeunes femmes à Téhéran se livrent à la prostitution à cause de la pauvreté, 35 % d’entre elles étant mariées. Un spécialiste dans ce domaine a déclaré à l’agence MOWJ le 11 juin que 30 % de ces femmes ont un diplôme d’étude secondaire et universitaire, 50 % n’ont pas de baccalauréat et seul un faible pourcentage est analphabète.
Les Minorités Ethniques et Religieuses
Au mois de juin la répression contre les minorités s’est accrue :
Leïla Abdinejad, chrétienne nouvellement convertie, a été arrêtée le 5 juin chez elle à Karajd en banlieue de Téhéran. Elle serait emprisonnée à Evine, mais sa famille n’a eu aucun contact avec elle depuis son arrestation.
Cheida Tayid, de la minorité bahaïe, est en prison depuis le 23 juin à Babol, dans le nord de l’Iran, après avoir été condamnée à un an derrière les barreaux le 15 avril 2014.
Une autre femme de la communauté bahaïe a été arrêtée après un mois de persécution entrainant la fermeture définitive de son entreprise. Sara Akhlaghi habite à Chiraz. Elle a été convoquée au tribunal le 16 juin 2016, afin de signer des papiers pour la réouverture de son magasin mis sous scellés. Mme Akhlaghi avait posté de photos de robes de mariée de son magasin sur Instagram. La cyberpolice a piraté et bloqué son compte pour « diffusion de photographies indécentes incitant à enfreindre la pudeur publique ».
Protestations de femmes
Malgré les nombreuses campagnes des autorités en Iran pour les soumettre, les femmes ont continué à manifester et protester au mois de juin.
Les épouses des pompiers de la ville de Racht, dans le nord du pays, se sont réunies le 26 juin pour réclamer les salaires non payés de leurs maris. La manifestation coïncidait avec la cérémonie de rupture du jeûne, en ce mois de Ramadan, organisée par le maire de la ville avec 3000 convives. Les manifestantes ont dénoncé ces fêtes luxueuses alors que les salaires ne sont pas versés et que leurs familles vivent sous le seuil de pauvreté
La famille du syndicaliste emprisonné Jafar Azimzadeh et un certain nombre d’enseignants et d’ouvriers, se rassemblés devant la prison d’Evine à Téhéran le 11 juin. Ils ont protesté contre les autorités qui ignoraient les exigences du prisonnier politique engagé dans une longue grève de la faim et dans un état de santé dangereux. Fort heureusement, ce rassemblement et une vaste campagne pour la libération de ce syndicaliste ont atteint leur but et fait libérer Jafar Azimzadeh.
Par ailleurs, un grand nombre d’enseignants retraités, dont beaucoup de femmes, ont organisé une manifestation devant le tribunal administratif à Téhéran le 8 juin 2016. Ils protestaient contre l’incapacité du gouvernement de Rohani à répondre à leurs besoins, à leurs mauvaises conditions de vie et le montant dérisoire de leurs pensions.